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 Savior

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Yrëan Gysne
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Yrëan Gysne


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MessageSujet: Savior   Savior EmptyMer 11 Avr - 14:27

Bon, voilà un truc un peu mieux que mon premier texte, je pense :/
Excusez les imperfections, c'est du brut de coffrage, non relu et improvisé de bout en bout.

PROLOGUE

Qu'est ce qui fait fuir un dieu ?
Qu'est ce qui terrorise une divinité ?
La Bienfaitrice avait sa réponse. Elle courait, aussi vite qui le permettait le tissu de cette réalité. Elle se trouvait dans son palais de nacre lumineux, aux confins des Terres de Sérénité, où le Dernier Cercle des Grands Dragons Finkelynes lui avaient dressé un bastion cyclopéen, à sa gloire. La grande gloire de la Faiseuse de Lumière !
Son palais marquait à la fois la limite de ces terres, et la porte vers une autre dimension. Quand on en passait la grande arche d'entrée, on cessait d'appartenir aux mondes vivants, pour passer dans celui des champs élyséens infinis qui s'étendaient derrière le palais, où la Nuit et le Mal n'avaient plus aucun droit.
Rien de ce qui vivait ne pouvait passer la porte, ni rien de ce qui était mauvais. Ainsi le palais avait été construit, ainsi il était conçu, et ainsi régnait, tel un passeur séculaire, la déesse omnipotente qu'on appelait la Bienfaitrice, ou la Faiseuse de Lumière, sur ce monde béni par les Finkelynes.
Ce lieu titanesque irradiait déjà de son pouvoir avant qu'elle ne l'occupe, et son arrivée n'avait fait qu'accroître cela. Des étoffes à demi-éthérées volaient partout dans les halls aux plafonds inaccessibles, reflétant une lumière douce et vive à la fois, qui étincelait sur chaque surface, comme si tout le palais ne devait être qu'une ode à la gloire de la beauté.
De vastes salles miroitantes, aux fenêtres en ogive innombrables, des halls ne conduisant nulle part ailleurs qu'à la candeur paisible des âmes justes, des passages sans fins, où l'on pouvait se perdre des millénaires durant, sans jamais avoir besoin de boire ni de manger, car l'on s'y nourrissait des divins éclats de poussières d'étoiles qui chassaient des rayons de lumière apaisants…

La Bienfaitrice pouvait paraître étonnement écrasée par l'immensité du palais de nacre, et pourtant, il irradiait d'elle une telle puissance, une telle présence, que l'on ne pouvait en sa présence que s'agenouiller, et prêter des serments de loyauté éternelle, libres de cœur à tout jamais. Le plus puissant des destructeurs pliait le genou devant la Faiseuse de Lumière, devenant le plus humble et larmoyant des serviteurs. La lumière qui émanait d'elle n'avait pas d'autres couleurs que celle de l'âme absoute de tout maléfice, ou brûlait dans des feux de joie sans limite…

Et pourtant, en cet instant, la Faiseuse fuyait, tenter à grand peine de percer les mystères égarants de son propre palais, pour atteindre la Grande Arche, qui lui permettrait d'échapper aux replis cotonneux des jeux de confusion de sa maisonnée titanesque. Quelque… quelque chose était après elle… quelque chose qu'elle avait appris à connaître, et à redouter, depuis des temps immémoriaux dont tous les soleils de l'univers ne sauraient se rappeler l'ancienneté abyssale.
Dans des ères que nul ne saurait plus définir ou imaginer, la déesse avait vu tant de choses, mené tant de batailles, vécu tant de vies entières d'immortels…
Là où on pense que l'univers n'existe pas encore, si loin dans le passé qu'aucune temporalité ne saurait naître, dans des âges improbables, la Faiseuse de Lumière avait vécu, et activement participé, aux premières Grandes Guerres.
Des guerres où les Dieux perdaient la vie, au prix de souffrances indicibles qu'aucun mot d'aucune langue ne pourra jamais décrire…
Elle… y avait survécu, comme… comme d'autres choses, aussi. D'autres entités. Plus sombres, et plus… terrifiantes que l'insondable oubli dans lequel la déesse avait souvent été plongée.
Même les Dieux n'ont parfois pas la mémoire assez longue, quand l'univers s'en mêle. Mais même alors, il existe des choses dont on se rappelle, quelque part, comme des mises en garde inscrites en lettres de feu sur l'essence même de chaque être.

La Faiseuse de Lumière courait à en perdre la vie. Une de ces mises en garde s'était rappelée à son instinct. Elle n'avait qu'une vague idée de ce qu'elle fuyait, mais cette idée lui coupait toute ressource, tout accès à sa condition divine supérieure. Cette idée avait sa manière de faire comprendre à la Bienfaitrice qu'elle ne possédait aucun autre choix que celui de courir, quand bien même toutes les réalités de cet univers et des autres ne suffiraient pas à l'arrêter, à arrêter cette… mise en garde, cette peur, cette terreur incarnée…

Les cheveux long d'un noir d'ébène de la Bienfaitrice rebondissaient sur son dos, où sa robe diaphane jouait de douceurs violentes et claquait derrière elle. Ses deux yeux d'un blanc laiteux irradiait la force du désespoir, et la toute-puissante détermination d'une déesse qui cherche une solution a un problème insoluble. Elle courait vite, très vite, même si ça ne suffirait peut être pas. C'était la seule chose qu'elle pouvait faire, ça et espérer survivre encore à chaque goutte de temps, pour la voir s'écouler dans la grande marée des Temps en étant encore vivante, bien vivante.
Bientôt, elle serait à la Grande Arche d'entrée, mais…
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Yrëan Gysne
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Yrëan Gysne


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MessageSujet: Re: Savior   Savior EmptyVen 13 Avr - 12:30

CHAPITRE 1

- Allez, s'il te plait ?
- Non, crève.
- Oh, ça va, t'es pas obligé d'être méchante, non plus.
Bastien fut quelque peu douché par la froideur, certes habituelle, mais jamais apprécié, de Catherina.
Déjà deux mois que les cours du lycée avaient commencé, et Bastien tentait toujours de rompre la glace avec Catherina. Elle avait un je-ne-sais-quoi qui attirait Bastien dans le filet envoûtant de son regard bleu froid et inexpressif. Une sorte d'air solennel, et un charme certain malgré son physique assez banal et pas franchement attirant.
Au-delà de ça, et des hormones parfois furieuses du jeune adolescent, Bastien traînait toujours avec Catherina… simplement parce que c'était à côté d'elle qu'il s'était retrouvé au premier cours.
Mais, étrangement, elle n'avait pas cherché le moindre contact avec qui que ce soit d'autre. Bastien, lui, avait deux trois autres copains, malheureusement disséminés dans d'autres classes, qu'il voyait à l'occasion, et avec qui il mangeait le midi. Mais Catherina, elle, non. Elle était toujours seule, et semblait bien mieux se porter ainsi. Elle ne semblait ni introvertie, ni rêveuse, elle avait juste l'air de regarder le monde avec une certaine froideur, et une humeur toujours légèrement agacée, quand elle n'était pas franchement désagréable.
Pourtant, elle savait parfois être gentille, sans aucune maladresse d'ailleurs. C'était juste comme cela, parfois, ça venait spontanément, sans intention particulière, puis elle se refroidissait lentement, perdant un peu de chaleur humaine, et prenant de la distance.
Le silence l'accompagnait toujours, même si elle aimait bien bavarder, en fin de compte.

Bastien s'était aperçu que Catherina appréciait un peu, parfois (peut être ?) sa compagnie, même s'ils rentraient tous les deux dans une espèce de relation vache qui irritait beaucoup Bastien. Cela semblait convenir à Catherina, mais Bastien, quand bien même il ne savait pas vraiment ce qu'il attendait de la vie, savait qu'il ne resterait pas longtemps avec quelqu'un d'aussi peu sympathique. Un peu de bonhomie n'avait jamais tué personne, et le garçon avait ses limites, comme tout le monde. Il n'allait pas rester sur le pas de la porte du grand château de mademoiselle Catherina éternellement.
Mais quelque chose disait à Bastien que Catherina ne lui en voudrait pas trop de partir, même si elle ne le souhaitait pas vraiment non plus.
C'était juste… comme ça. Ils passaient leur journée ensemble, à se concentrer sur des cours qui dépensaient souvent Bastien.

Il avait toujours eu du mal à se concentrer, et devait bien reconnaître qu'une camarade comme Catherina aidait à remonter sa moyenne générale, vu le peu d'espoir qu'il pouvait avoir de la voir le dissiper, en classe. Souvent muette comme une carpe, rien de tel pour se recentrer sur le flot de paroles assommantes des professeurs.
Hélas, Bastien se retrouvait aussi souvent devant le cours que dans sa tête, voyageant loin au-dessus des petits nuages, à tenter tant bien que mal de trouver une piste d'atterrissage sur la planète Terre…
C'était un garçon… bien, sans plus. Il était à son grand dam d'une banalité incroyable, c'était monsieur "sans plus". Il était un peu timide, mais sans plus, assez gentil et travailleur, mais sans plus, assez sympa, mais sans plus. Assez rusé aussi, mais… sans plus. Plutôt petit, les cheveux bruns, une bouille sympathique, la vie ne l'avait pas doté d'aspérités sur lesquels grimper pour aller plus haut, mais il n'avait pas non plus dans son existence de récifs arrachant un peu ses vêtements.
Pas de problèmes, mais pas de passions. Pas d'ennui, mais pas d'amis. Pas trop d'avenir, mais pas de voies sans issues non plus. Il avait souvent le sentiment qu'un marin peu scrupuleux avait choisi une mer calme, puis avait scotché le gouvernail de sa vie, avant de sauter à l'eau et de partir. Bastien restait dans la barque, et n'avait plus qu'à compter les poissons en attendant une hypothétique surprise.
C'était à la fois consternant et rassurant. La vie manquait légèrement de sel, et Bastien était bercé d'un léger ennui, mais quand il voyait les turpitudes des autres, finalement, il souriait avec une insolente béatitude devant le manque d'aléas de son quotidien.

Catherina était à l'image de cela, en fait : sans aspérité, sans surprises. Pour la taquiner un peu, il lui avait demander de sourire, et voilà le résultat : il se faisait joyeusement refroidir.
- C'était juste une blague, Catherina.
Elle ne répondit rien, comme d'habitude, se contentant de regarder la cours de récréation, où les lycéens se retenaient à grand peine de courir partout comme des enfants qu'ils étaient encore au fond d'eux.

C'était une journée d'automne plutôt fraîche, et déjà la lumière du jour semblait tacitement décliner sur cette fin d'après-midi.
Bastien fourra les mains dans ses poches, et tapa du pied dans un caillou en bougonnant un peu, pour faire bonne mesure.
- Il fait froid, dit Catherina, inopinément.
Bastien, profitant de l'occasion, était sur le point de lui proposer son manteau bleu. Puis il la vit, les bras et les jambes croisées, sur le banc du fond de la cour. Elle le regardait, toujours avec son visage rond et inexpressif, si ce n'est un vague grognement perché au coin de ses sourcils fins. Bastien compris que la remarque aurait très bien sortir de la bouche de quelqu'un d'autre, ou qu'elle avait parlé toute seule. Ce n'était pas un début de discussion, comme l'avait espéré Bastien, mais juste une affirmation.
Pourtant, quelque chose disait à Bastien que la jeune adolescente attendait une réponse.
- Bon, viens, soupira-t-il. Tant qu'à rien faire dans la cour, autant retourner en classe, la prof de français devrait pas nous faire de misères pour un peu d'avance.

Elle se leva, et le suivit, moitié à regrets, moitié d'accord.
Il traversèrent la cour, puis le préau, pour monter au deuxième étage à leur salle de cour. Catherina ne décroisait pas ses bras, et ne desserra pas les lèvres, mais vu que Bastien était plutôt pensif, cela ne changeait pas grand chose.
Il perdit totalement le cour de ses pensées en ouvrant la porte de la salle de cours.
En fait, il ne perdit le fil qu'après avoir tourné la poignée, et entrouvert la porte. Il s'arrêta net, et eu un petit mouvement de recul, en sentant une bouffée de chaleur intense s'échapper dans un chuintement lancinant de la salle. L'intérieur de la pièce était dans l'obscurité la plus totale, mise à part une lumière ocre qui éclairait à grand peine une atmosphère moite d'été indien.
Bastien recula vivement, cela ne ressemblait pas du tout, même de très loin, à la salle que lui et Catherina avait quitté dix minutes avant.
Il lâcha la poignée quand il sentit que la porte était tirée de l'intérieur. Il recula précipitamment, cognant l'épaule de Catherina, qui reculait autant que lui de toute manière.
Une femme apparut dans l'encadrement de la porte. Elle était grande, et probablement plus proche de la trentaine d'années que de la vingtaine. Elle portait un costume bleu nuit, qu'on aurait taillé pour des cowboys de farwest plutôt que pour quelqu'un de son allure. Elle avait une chevelure rousse fournie et en bataille, et un visage qui avait quelque chose d'enfantin, de par ses grands yeux et sa large bouche.
La femme était presque belle, et pleine d'allant. Elle avait une présence et un charme aussi féroces qu'indéniables, et la vue d'une vieille winchester dans sa main droite, crosse appuyée sur la hanche, ne faisait rien pour contredire ce tableau étrange et irréel.
Bastien cru qu'il allait s'étouffer de surprise, et Catherina ouvrait de grands yeux ébahis, la bouche légèrement pendante.

Savior Likaonwe7.th


Des filets de fumée s'échappait de l'ouverture de la porte, et de deux pas rapides, la femme rentra dans le couloir. Bastien tomba en arrière, sur ses fesses, en reculant de peur.
D'où venait cette femme à l'aura impressionnante ? Surtout dans cet accoutrement de spectacle ! Bizarrement, sur le moment, Bastien ne trouvait pas cela drôle, pas du tout. La vue d'une créature, probablement morte, étalée dans un liquide noirâtre, derrière la porte, ne prêtait pas à rire. Une bestiole énorme, baignant dans ce qu'on pourrait appeler du sang, et une femme qui tenait effectivement plus d'un chasseur que d'un professeur, qui émergeait d'une salle de cours mystérieusement plongée dans l'obscurité, où régnait une chaleur étouffante, cela n'avait rien d'un tableau amusant. Quelle porte infernale avait donc ouvert le jeune garçon ?
Une porte, oui, c'était cela, le détail de l'affaire, le chaînon manquant de l'explication qui tardait à venir.
Catherina était en état de choc, et Bastien hoquetait encore, lorsque la femme les toisa de toute sa hauteur, comme légèrement intriguée, mais pas décontenancée pour deux sous. Elle esquissait un sourire amusée lorsqu'une explosion assourdie retentit. La femme fut violemment projetée contre le mur en face de la porte, littéralement soulevée du sol. Bastien et Catherina n'était pas à proprement parlé devant la porte, et sursautèrent de surprise en voyant les cheveux en bataille de la femme quasiment tiré en avant, avant que le reste du corps suive, une fraction de seconde plus tard.
Bastien eu l'impression que la belle femme rousse venait de se prendre un camion invisible, lancé à pleine vitesse, dans le dos.
Elle poussa un bref cri de douleur en percutant le mur, où elle creuse des larges fissures, avant de retomber lourdement au sol.

Elle se massa la tête, et se releva en grognant et gémissant silencieusement. Elle posa un genou à terre, reprit son fusil, et se releva. La porte était de nouveau fermée, et personne ne semblait avoir rien remarqué, comme si tout cela était le fruit de leur imagination.
La femme fit alors entendre sa voix, douce et claire, dans le couloir désormais calme :
- J'oublie toujours à quelle vitesse ces passages se referment…
Elle les regarda à nouveau, jetant un bref regard autour d'elle avant de reporter son attention sur eux.
Elle les détailla, l'un puis l'autre, ses deux sourcils discrets se fronçant sous l'impulsion d'une réflexion patiente et consciencieuse. Il émanait d'elle une bonté indéfinissable, une sorte de compassion amicale rassurante, qui ne suffisait malheureusement pas à sortir de leur choc les deux adolescents.
- Je n'arrive pas à savoir lequel d'entre vous est-ce, même à cette distance… Donc je suppose que je vais devoir faire avec vous deux.
Elle semblait parvenu à une décision. Bastien avait désormais la bouche aussi pendante que Catherina, bien qu'elle gardait l'exclusivité des deux yeux ouverts comme des assiettes.
La femme claqua des doigts devant leur nez, ce qui fit pousser un petit cri de surprise à Catherina, alors que Bastien levait prestement les bras devant lui pour se protéger.
- Réveillez vous, demanda la femme aux cheveux roux avec gentillesse mais une pointe d'empressement dans la voix. On a du chemin à faire.
- Qui.. qui êtes v-vous ?! Bégaya Bastien.
Elle eut un grand sourire, où l'on aurait pu se noyer avec bonheur. Un sourire d'une innocence et d'une franchise si entière que les deux adolescents lui sourire en retour, par pur réflexe.
- Je m'appelle Likaon, répondit-elle. Et toi ?
- Ba-bastien, madame.
- Et toi ?
- Catherina, dit la jeune fille d'une voix presque inaudible.
- Bien. Alors Bastien, Catherina, suivez moi je vous prie, nous n'avons pas toute la vie devant nous, et les réponses viendront bien assez tôt.
- Oui madame, dirent-ils à l'unisson, complètement hypnotisé par le charme presque maternelle de la femme rousse.

Sans plus de cérémonie, elle rangea son fusil dans son dos, et partit en direction de l'escalier, sans même se retourner. Bastien et Catherina la suivirent sans hésitation. La femme ôta un de ses gants blancs, et s'essuya le front d'une main gracile. Faisant la discussion sans vraiment attendre de réponse, elle dit :
- Il fait quand même bien meilleur chez vous.
Elle soupira, et descendit prestement les escaliers, les deux jeunes gens sur ses talons…

***


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Yrëan Gysne
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MessageSujet: Re: Savior   Savior EmptyVen 13 Avr - 14:09

***

La Bienfaitrice était parvenue à sortir de ce qui s'était appelé le palais de nacre. Le Grand Cercle Draconique lui avait gagné un temps précieux, qu'elle avait pu mettre à profit pour trouver une faille dans le continuum de probabilité.
Une fois perdue dans les passages courts et étroits de Sigyl, elle avait pu se rendre compte, malgré elle, que la poursuite était loin d'être terminée.

De toute manière, elle n'en avait pas douté une seule fraction d'instant. Elle avait perdu une grande partie de sa prestance, à courir telle une voleuse dans les rues démentes et grandioses de la Cité des Mille et Un Portails.
Pourchassée, elle avait néanmoins pu récupérer une grande partie de ses pouvoirs. L'emprise étrange faiblissait, ici. Elle n'allait pourtant pas connaître le plaisir de pouvoir agir, de pouvoir user de ses pouvoirs célestes et infinis. Elle n'avait pas la folie de croire qu'elle pourrait démontrer une parcelle de sa juste suprématie, et de violer les règles et la Pax Sigyline de la Cité-Plan. Personne n'avait intérêt à attirer l'attention dans cet endroit neutre.
Il s'y trouvait beaucoup d'yeux, beaucoup d'oreilles, et beaucoup d'attentions, à la solde d'une myriade de camps, dont chacun pouvait trouver intérêt à sa situation actuelle. Elle n'était pas en mesure d'en assumer les conséquences et d'agir contre, pour l'instant, il ne valait donc mieux pas attiser les convoitises.
Rien que le fait d'apprendre qu'elle venait du palais de nacre était potentiellement très dangereux… non tant pour elle, mais pour les pauvres survivants du Cercle des Finkelynes. Ils ne méritaient pas ça, surtout pas après la dette qu'elle avait contracté auprès d'eux depuis qu'ils avaient tenté de prendre son parti.

Mais tout cela appartenait d'ors et déjà à un passé révolu et définitif… Un passé de ruines et de morts, un passé de souffrance, qui faisait curieusement écho à tous ces âges si lointains qu'elle avait vu passer.
Non ! Elle devait oublier cela, ou ne pas y penser. Rien que cela pouvait précipiter la poursuite vers une fin intolérable.
Mais… trop tard, son souvenir la rattrapait, alors même qu'elle débouchait dans les ruines poussiéreuses d'un no man's land sigylien. Un de ces vieux quartiers, atomisés depuis longtemps par des guerres clandestines incessantes, ou par des batailles officialisées, en plein cœur de la ville, entre des factions destructrices aux moyens militaires colossaux. Le terrain vague de plusieurs kilomètres était parsemé de trou d'obus et de grands bâtiments à demi-effondrés.

La Faiseuse de Lumière ouvrit ses sens, et elle perçut aussi bien qu'elle aurait vu, l'obscurité grandissante, galopante, qui laissait présager du funeste destin qu'on voulait lui imposer. Elle sentit la lumière décroître, la vie s'échapper, et ses pensées devenir murmures, puis silences. Un voile opaque tomba lentement sur toutes les dimensions contiguës qu'elle pouvait percevoir. Ses yeux blancs lui permettaient de voir entre les mondes, au-delà du temps, de l'espace, et des infinités de plans qui séparaient ou croisaient les univers au gré des vagues de magies paradoxales et errantes. Ces mondes mouraient, ces univers disparaissaient. Un écho tragique, mais inexorable, de la puissance qui émanait derrière elle. Nul rempart, nul bouclier. Rien n'était hors de portée. Des galaxies entières implosaient, dans des micro-univers et des macros-réalités, où des entités éthérées hurlaient de millions de voies des souffrances éternelles. Dans le ciel de plus en plus obscur de Sigyl, la Faiseuse de Lumière commençait à voir des oiseaux mourir en plein vol, lâchant de faibles nuages de sang et de plumes, tandis que des étoiles brûlaient, comme autant de comètes éphémères finissant dans un désespoir fataliste leur ode à l'existence et à la vie.
Personne ne s'en apercevrait, car dans une poignée de secondes, elle serait rattrapée. Pour elle, cela serait la fin, une fin terrible et atroce, que rien ne pourra jamais décrire, mais le reste des choses continuera de vivre, comme si rien ne s'était vraiment passé. Somme toute, dans un multivers infini, même la richesse gargantuesque de son existence ne représente rien…

Une pulsion fit frémir ses membres, et elle décolla du sol. Elle se retourna, en l'air, pour faire face à ces souvenirs funestes qui se focalisaient sur elle, à l'en faire trembler. D'un son puissant qu'on aurait difficilement pu qualifier de cri, ou d'incantation, tellement sa portée et son énergie plongeaient leurs racines dans les entrailles abyssales des arcanes divines, elle libéra son pouvoir.
D'une vague de force pure, unique, tous les bâtiments du vieux quartier furent pulvérisés sur place, à des kilomètres à la ronde. Avant même que son pied touche le sol, elle avait renvoyé une deuxième vague, qui transforma tout ce qui restait en poussière d'étoile, cristallisée sous l'afflux massif de violence énergétique. Retombant au sol, elle déchaîna un maelström de plasma qui plièrent puis firent craquer les lois physiques de cette réalité, plongeant le champ de bataille en une série de concepts dichotomiques distordus, où elle perdit instantanément toute forme matérielle.
Un nexus de dispersion paracheva son œuvre de destruction. La temporalité de ce secteur existentiel rompue, les instants se succédèrent de manière hiératique, lui permettant de réunir des morceaux de son avatar physique et psychique au gré des bulles de temps qui s'enflammaient dans le chaos le plus total.
Sachant bien que cela serait loin de suffire, elle profita de la diversion pour disparaître dans une autre réalité.
Des forces qui pourraient bien lui arriver à la cheville devaient déjà être en train de rassembler, reconstruire et restaurer cette dimension de première importance. Elle, elle devait partir, fuir, bien plus loin dans l'espace-temps que jamais elle n'avait osé imaginer le faire.

Des dieux moins puissants qu'elle, ou moins anciens, auraient pu prendre quelques instants d'espoir, quant à la réussite d'une telle orgie de brutalité. La perfection oblitératrice d'un tel assaut aurait pu les fourvoyer, et leur faire croire à une réussite potentielle.
Mais la Faiseuse de Lumière ne faisait pas partie de ceux là : elle ne se faisait aucune illusion, quand bien même elle aurait peut être pu. Elle avait participé aux Premières Grandes Guerres…. Si personne ne s'en souvenait, déités ou immortels, et bien plus encore, c'était pourtant pour une raison évidente : bien peu de ce qui avait été y avait survécu.
Elle était de ceux là. Elle avait participé aux Premières Guerres, elle savait à quoi s'en tenir. Elle savait que contre ce qui la poursuivait, l'espoir était un poison mortel…


Dernière édition par le Dim 15 Avr - 10:17, édité 1 fois
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Yrëan Gysne
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MessageSujet: Re: Savior   Savior EmptyDim 15 Avr - 10:17

***

- Bastieeen !
Les chuchotements de Catherina se faisaient de plus en plus pressants.
- Bastieeen !
- Mais quoi ? Chuchota-t-il en retour, aussi fort qu'il pensait pouvoir le faire sans attirer l'attention de la femme rousse.
Le costume et le fusil de la femme ne semblaient déranger personne, dans la rue, depuis qu'ils étaient sortis de l'école. Elle ne semblait pas réellement savoir où elle allait, mais semblait trouver son chemin avec une détermination candide et insouciante qui rendait les deux adolescents plutôt méfiants.
Bastien comme Catherina ne savaient toujours pas pourquoi ils suivaient la femme qui avait dit s'appeler Likaon, mais… ils restaient quand même sur ses traces, dociles bien que vigilants. Où pouvait-elle bien les emmener ?
Catherina s'était penchée vers lui, et lui tirait sur la manche, le regardant avec des yeux insistants :
- On est en train de sécher les cours ! Sussura-t-elle d'un ton de reproches.
- Mais je sais ! Rétorqua le garçon, exaspéré. Mais qu'est ce que tu veux que je fasse, moi ?
- Je sais pas, mais…
- Mais moi non plus je sais pas, alors arrête un peu, Catherina, et réfléchis, toi aussi.
Bastien ne paniquait pas, mais il n'aurait pas fallu beaucoup le pousser quand même. Il était en sueur, et avait les oreilles rouges, bien qu'il ne fasse pas chaud et qu'ils ne marchent pas très rapidement. Son cerveau avait juste du mal à rattraper les événements. Catherina aussi était rouge, et avançait d'un air qu'elle devait espérer dégagé, mais qui ne trompait personne. Le pas rapide, les regards nerveux à tous les passants, Catherina était aussi discrète que si elle secouait un panneau "REGARDEZ MOI" au-dessus de sa tête en chantant à tue-tête.
Likaon, elle, souriait, comme si de rien était, de ce petit sourire en coin rassurant de qui arriverait à convaincre un taureau de corrida de s'asseoir pour boire une petite grenadine avec le torero autour de quelques gâteaux apéritifs.
D'un certain côté, Bastien prenait plaisir à cette expérience, au-delà du fait qu'il préférerait largement être en cours sans avoir à réfléchir à ce qui était en train de lui arriver. Il fallait voir le bon côté des choses : cela mettait Catherina en porte-à-faux, et rien que cela faisait plaisir à voir, même si le garçon en ressentait une certaine honte. Mais de toute façon, lui aussi était complètement déstabilisé par cette situation, ça devait équilibrer, non ?
L'autre chose qui rassurait Bastien, c'était Likaon, tout simplement. Son magnétisme féminin, presque animal, avait tout pour réconforter Bastien. Elle avait un charisme et un pouvoir de séduction incroyable, et, sans aucune arrière pensée ni envie particulière, Bastien l'aurait sûrement suivi un peu près n'importe où sans trop rechigner. Likaon marchait, et Bastien suivait, bien content que cela puisse se résumer à cela.
- Bastien !
Catherina avait changé de ton, teintant sa voix d'une pointe de menace à peine déguisée.
- Parce que tu crois que c'est de ma faute, peut être ? Lui répondit-il méchamment.
Cela suffit apparemment à calmer Catherina, qui se ravisa, et se contenta finalement de s'accrocher à sa manche en regardant vivement autour d'elle.
Bastien n'en menait pas vraiment large non plus, de toute façon.

Likaon s'arrêta au bout d'un moment devant une maison, qui ressemblait à n'importe quelle autre, et qui n'était pas très du lycée.
Elle observa la façade un instant, semblant hésiter, puis ouvrit directement la porte, sans sonner ni frapper. Les volets étaient tous fermés, mais la porte, elle, était ouverte.
A l'intérieur, il faisait frais, et il n'y avait aucune lumière.
Likaon semblant très sûre d'elle, les deux adolescents suivirent, assez gênés, la femme, qui ne prenait même pas la peine de les attendre ou de refermer la porte derrière elle.
Il n'y avait aucun autre bruit que celui des pas de Likaon, à l'intérieur, ce qui était assez angoissant. Bastien vit Catherina sur le point de demander s'il y avait quelqu'un, mais elle n'osa finalement pas rompre le silence épais des pièces poussiéreuses de la maison.
Bastien alla pour ferme la porte. Mais alors qu'il commençait à la tirer derrière lui, il se dit qu'il valait peut être mieux la laisser ouverte, justement. Après tout, il ne savait pas ce que Likaon attendait d'eux, mais il préférait se ménager une porte de sortie.
Il vint caler une chaise sous la poignée de la porte ouverte. C'était totalement dérisoire, mais pouvoir être sûr que la porte ne se refermerait pas sur eux d'un simple petit coup de vent apaisa un peu le jeune garçon…

La femme rousse était parti dans le fin du couloir d'entrée, mais revint les chercher quand elle s'aperçut qu'ils ne suivaient plus :
- Alors, vous venez ? Demanda-t-elle comme si c'était l'évidence même.
Catherina et Bastien s'entre-regardèrent, et décidèrent sans se concerter qu'il aurait été stupide d'aller jusque là, pour finalement s'arrêter.
Ou bien était-ce stupide de continuer ?
L'un après l'autre, ils la suivirent. Il tentèrent bien de lui poser quelques questions, mais Likaon ne répondait jamais, alors ils abandonnèrent. N'étant ni l'un ni l'autre d'un naturel très bavard, cela leur convenait bien.

La petite troupe descendit l'escalier qui menait à la cave, bien que Likaon semblait à fois sûre d'où elle allait et complètement intriguée par tout ce qui l'entourait. Bastien avait fini par se convaincre que son costume n'était pas là pour amuser la galerie : Likaon devait vraiment venir d'un autre monde, et découvrir ce qui l'entourait tout comme Bastien découvrirait avec une certaine hébétude les métros japonais s'il allait prendre des vacances à Tokyo.

Arrivée dans la cave, Likaon alluma la lumière, un petit plafonnier qui éclairait mal et peu le sol en terre humide et les murs plein de toiles d'araignée et de poussière. Quelques étagères se disputaient les rares bibelots et bouteilles de vin oubliées dans cette cave, et dans un coin, un cageot de patate avaits germé, pourri puis s'était décomposé depuis belle lurette.
A part une mouche égarée et une porte dans le fond, il n'y avait absolument rien de notable dans cette cave, et les traces de pas discrètes que laissaient les trois compagnons dans la poussière démontraient qu'ils étaient les premiers à descendre là depuis pas mal de mois, ou d'années.
Likaon marcha d'un pas décidé vers la porte, qu'elle ouvrit : une autre volée d'escaliers descendaient apparemment dans un deuxième sous-sol. Ils les empruntèrent.
Le deuxième sous-sol était intégralement vide, à part une chaudière rouillée, et n'avait même pas de poussière à faire partager.
Une autre porte, de bois vermoulu cette fois ci, se trouvait dans le fond.

Autre porte, autre escalier qui descendait encore.
La musique se répéta trois, quatre, cinq fois. Bastien et Catherina n'étaient plus angoissés, bien que mal à l'aise, mais plutôt intrigués. Le fait qu'il n'y avait rien dans ces caves était le plus étrange. Bastien se serait attendu à des placards, des vieux meubles, voire même une grenade datant de la guerre 40, peut être ? Signe d'un abandon de longue date des locaux. Mais non, rien, à peine un ou deux rares insectes paresseux.

Au septième sous-sol, la porte d'accès n'était plus en bois rongé se désagrégeant par plaques entières au moindre contact, mais dans un métal qui s'apparentait à de l'acier. Qui s'apparentait seulement, car, malheureusement, elle aurait dû en toute logique être complètement rouillée… Hors, elle était comme neuve.
Bastien et Catherina n'eurent pas beaucoup de temps pour se poser des questions, Likaon, visiblement très heureuse, ouvrit rapidement la porte, et s'engagea, non plus dans un petit recoin ou boyau quelconque, mais dans ce qui devait être une vaste salle totalement noire.
L'air de la nouvelle pièce était très dense, mais ne sentait ni mauvais, ni bon. Il ne portait aucune odeur particulière, aucune saveur, et n'était même pas vraiment frais.
Un silence pesant régnait sur les lieux, loin sous la surface de la ville, et Bastien se surpris retenir sa respiration pour ne pas le briser.
La porte en métal, pour le coup, se referma, silencieusement mais très fermement.
Likaon fit cinq mètres d'un pas sûr et léger, dans l'obscurité la plus totale, et l'on entendit un froissement d'étoffe.
Tout à coup, une respiration immensément profonde se fit entendre, comme un souffle puissant d'une machine immense. Un respiration ample, calme et… difficile, comme si ce qui la déclenchait n'avait pas respirer depuis des éons.
Bastien entendit Likaon revenir, alors que Catherina lui broyait le bras de ses ongles, apeurée.
Un petit clic, et un plafonnier s'alluma juste au dessus d'eux, juste après le seuil de la porte.
Bastien vit alors une chose qu'il trouva de prime abord aussi incompréhensible qu'effrayante. A cinq mètres de là, à la périphérie de l'éclairage faible dispensé par le plafonnier, se trouvait ce que Bastien aurait d'abord appelé une "masse de chair organique".
Cela semblait vivant, cela bougeait faiblement, et cela était gros, très gros. Ca n'avait rien d'un paquet d'entrailles, bien que la disposition et la forme générale y ressemblait. Une des différences était que les entrailles en question étaient des morceaux de plusieurs mètres à chaque fois, de long comme de large ou de diamètre. C'était cela qui donnait une impression de gigantisme à se qui s'offrait à la vue des deux adolescents.
La deuxième différence, qui troquait l'aspect écœurant d'un tas d'entrailles contre l'aspect incompréhensible de la vision, c'était que le tout était d'une couleur grise, tirant sur le bleu très pâle. De vagues reflets semi-métalliques parcouraient la surface des "morceaux", laissant entrevoir dans la pénombre des plaques souples qui formaient la "peau" de la chose.
Le jeu de muscle qui s'offrait à lui commença à faire fonctionner certaines zones de son cerveau, qui comparèrent, analysèrent, puis lui donnèrent un vague schéma de compréhension de ce qu'il voyait. Il sut, sans trop savoir comment, qu'il ne voyait qu'un morceau de la chose, et que le reste devait vraisemblablement s'étaler en hauteur.
D'un regard lent et passablement terrifié, il comprit que le tuyau central, plus longiligne et simiesque que les autres, devait être la base d'un cou. Un cou qui montait… montait… jusqu'à…
La tête du dragon descendit lentement à sa hauteur. Il n'avait pas de gueule, pas d'ouïe, mais un museau racé et effilé derrière lequel deux yeux flamboyants de bleus, comme des pierres précieuses plus grosses qu'une main pleine, le toisait avec insistance.
Des sons étranges, assourdis et déformés, jaillir comme des feux d'artifices éphémères dans l'esprit de Bastien, avant qu'il ne tombe inconscient, presque une seconde avant Catherina.


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MessageSujet: Re: Savior   Savior EmptyVen 20 Avr - 6:50

Lorsqu'il se réveilla, il n'aurait pas su dire combien de temps avait bien pu s'écouler, au fond de ce sous-sol d'un noir d'encre.
Il n'avait pas rêvé, le dragon était encore là, et bien là ! Il se tenait assis sur son postérieur, la tête haute, et une dignité incroyable se dégageait de lui. La corne sur son museau bougeait imperceptiblement, et ses yeux captaient toujours des éclats de lumière sortis de nulle part. Il était extrêmement massif, et pourtant fin et élancé.
Dans cette cave, il ne devait sûrement pas pouvoir bouger, son envergure, ailes repliées et épaules rentrées, le faisant s'ajuster au plus proche de la place disponible de la salle. Comment avait-il pu rentrer là dedans au départ, Bastien aurait été bien incapable de le dire. Pourtant, même engoncé bien malgré lui dans ce petit espace, le dragon était majestueux, et respirait le parfum d'un million d'étoiles dans un ciel infini.
Les vagues bruits que Bastien avait cru entendre s'étaient multipliés, drastiquement. Un vrai opéra, dont il ignorait les règles et la mesure, semblait se jouer dans la pièce. Les sons venaient de nulle part, et se répercutaient dans des angles que Bastien ne percevait pas. Même les échos étaient étranges, distordus.
Bastien en vint rapidement à se dire que tout cela se jouait dans sa tête. Des morceaux de phrases volaient de part à d'autres de son crâne, lui donnant l'impression d'une mélopée diffuse et chaotique, de se trouver au carrefour d'un lieu sonore étrange aux contours estompés.
Des bruits de synthétiseurs, des bruits électroniques, des bruits de vagues d'eau inexplicables, des roulements, des cascades de sons qui faisaient presque peur. Tout cela lui semblait… étranger. Cela lui évoquait d'autres mondes, d'autres choses, d'autres cieux qu'il ne connaissait ni ne connaîtrait jamais, et qui pourtant semblaient porter leur tumulte de vie propre depuis des millénaires. Comme des temps si anciens et différents qu'ils devaient rester enfermés dans un songe inconnu, et ne percer le silence feutré que sporadiquement, comme portés par une onde ne se propageant que par les grâces hasardeuses d'un destin mystérieux.
Il croyait reconnaître des parcelles de phrases, au détour d'une vibration qui filait rapidement dans ses pensées confuses avant de disparaître à nouveau : "my tail's on fire !", "leurs cheveux grisaillèrent, leurs yeux devinrent néons, ils auraient fait la guerre, pour sucer un bonbon !", "i still dream… of organon…"
Autant de mots dénués de sens, et pourtant chargés de puissance sourde et impalpable.
Le dragon était à l'origine de tout cela. Ce n'était pas lui qui émettait les sons, mais c'était à cause de lui, ou grâce à lui, qu'ils se répandaient dans l'atmosphère humide de la cave obscure. Maintenant que la créature était là, et bien là, face à un Bastien impressionnable et impressionné, les bruits se densifiaient, passant de l'inaudible au perceptible, et d'une apparition ponctuelle à une présence nombreuse et intense.

Catherina aussi était à présent réveillée, bien qu'elle ne se soit pas relevée de son séant. Elle avait réussi à fermer la bouche, mais ses yeux trahissait un émoi intense.
Likaon réapparut dans la lumière, le visage toujours aussi paisible, et l'air encore plus sereine et souriante, si c'était dieu possible. Ses gestes étaient beaucoup plus lents, plus calmes, plus posés. On ne percevait plus dans son comportement la vivacité qui avait été sienne jusqu'alors. Elle prit la parole :
- Voici… voici un dragon-oracle…
Elle montra d'un geste de la main solennel la créature reptilienne derrière elle, qui pencha un peu son regard métallisé sur eux. Likaon reprit :
- Son nom est imprononçable dans votre langue mais… mais sa présence était un grand honneur, et un gage d'espoir pour nous tous.
Elle lança au dragon un regard chargé de gratitude et d'humilité. Puis elle reprit un air plus sombre, et sembla écouter cette musique des sphères que Bastien percevait sans arriver à la comprendre. Il entendit des séries de clochettes, et des éclats de rire cristallins jouant de mouvement dans son cerveau.
- Le draracle me demande de vous retransmettre ce qu'il m'explique… reprit Likaon.
Elle semblait perturbé par ce qu'elle venait d'apprendre, et Bastien cru voir ses yeux légèrement brillants, comme au bord des larmes...
- Il m'avait envoyé vous chercher… Je… j'avais idée de votre aura. Je, je ne devais trouver que l'un de vous deux, mais nous sommes, le draracle et moi, incapable de différencier vos auras, pour l'heure. Je m'adresse donc à vous deux.
Elle fit une pause, secouant la tête, et s'essuyant les yeux d'un revers de gant blanc. Une larme tinta au sol, son bruit venant rejoindre la mélodie tremblotante qui régnait toujours dans la pièce.
- Je devais vous amener ici, car.. car le draracle m'a appris qu'une chose… terrible, est arrivée. Notre déesse est pourchassée. Quelque part, dans d'autres temps, dans d'autres lieux. Nous ne pouvons rien pour elle. A ceci près qu'elle a investi quelque chose, dans l'un de vous deux. Quelque chose qui pourrait la sauver. Vous devez lui amener, pour sa survie, et la survie d'un million de monde…
Likaon se mis à genou par terre, devant eux, et leur pris à chacun une main :
- Vous devez nous aider, je vous en prie ! En étant obligé de prendre la fuite, notre maîtresse à déclencher ses ennemis. Ils bougent, désormais, et savent que tout son royaume est en danger, et très amoindri, s'il elle ne peut plus être là pour veiller dessus. Ses ennemis savent aussi, tout comme nous, que vous détenez au fond de vous un moyen de l'aider, et peut être d'être ses sauveurs. Ils vont vous pourchasser, vous aussi, que vous le vouliez ou non.
Likaon se releva, si belle et déterminé que Bastien sentit sa gorge se nouer. Il n'était pas prêt pour des choses pareilles !
Il regarda Catherina, qui elle aussi semblait très effrayée. Elle prit d'ailleurs la parole :
- Mais nous n'avons que seize ans ! Comment pouvons nous faire quoi que ce soit pour nous défendre !? Et comment pourrions nous vous aider, nous ne savions même pas que… que…
- Moi non plus, renchérit Bastien. Catherina et moi ne sommes que des adolescents normaux, comme tout le monde ! Pourquoi s'en prendre à nous ! Je n'ai jamais rien demandé à personne ! Comment allons nous nous défendre ?
- Ne vous inquiétez pas, leur dit Likaon de son sourire chaleureux et bienveillant. Notre déesse a prévenu ses serviteurs. Ils ont prévenu leurs propres suivants, qui ont prévenu leurs propres suivants. Et ceux là ont ensuite prévenu le draracle, qui m'a appelé. Et vous voici, désormais, sous notre protection.

Le dragon-oracle releva le museau, comme humant l'air ambiant. Une saveur de chlore et d'eau fraîche se répandit dans la cave. Likaon écoutait le langage féérique du draracle…
Celui-ci s'agita quelque peu, remuant de ses membres colossaux. Likaon reprit la parole, plus vive tout à coup :
- Ca y est, la chasse a commencé. Le draracle ne peut rien pour vous. Mais moi, par contre, il m'a confié la tâche de vous aider. Il m'a donné sa bénédiction et… certaines informations, qui devraient faciliter notre tâche. Nous devons partir, désormais. N'ayez crainte, je veille sur vous, comme d'autres le font, partout à travers la réalité des Mille Marches…

Et Likaon les poussa vers la porte, qui se rouvrit rapidement, tandis que derrière lui, Bastien sentait le flot des sons s'accélérer, se densifier, en même temps qu'il perdait de la puissance et semblait mourir. Plus Bastien et Catherina remontait vers la surface, plus les sons devenaient sourds et inaudibles. La seule chose dont Bastien avait soudainement pleinement conscience, c'était qu'une bataille avait commencé, et qu'ils y étaient rentrés de plein pied. Le choix ne leur avait jamais appartenu, et Bastien doutait d'avoir les épaules assez fortes pour tenir ce poids écrasant qui semblait devoir s'abattre sur lui. Mais, déjà très responsable et lucide malgré son jeune âge, il savait n'avoir aucun choix, et cela était déjà réconfortant en soi. Au moins, le doute n'était pas permis…
Lui et Catherina, des sauveurs ?


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Yrëan Gysne
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MessageSujet: Re: Savior   Savior EmptyVen 20 Avr - 6:52

CHAPITRE 2

- J'en ai assez de manger des biscuits apéritifs et des gâteaux secs, Likaon ! Geignit Catherina.
- Moi aussi ! Renchérit Bastien, plutôt grognon. Voilà deux jours qu'on voyage en train à travers tout le pays, pour aller nulle part ! On ne peut pas s'arrêter quelques heures pour se reposer dans une vraie chambre, prendre une vraie douche, et manger un vrai repas !?
Likaon regardait distraitement par la fenêtre du TGV, sa chevelure rousse reposant en cascade sur sa veste de cuir bleu nuit. Elle ne les écoutait pas, ou plutôt pas vraiment, selon toute apparence.
Bastien regarda le paysage défiler, voyant bien que la grande femme était de toute manière hermétique à leurs plaintes.
Il attarda son regard sur le banda noué autour du cou de Likaon, et crut capter une effluve de parfum discret mais prégnant, venu de Likaon.
Lui et Catherina prenaient des douches dans les mini-compartiments prévus à cet effet, dans les trains de première classe qu'ils prenaient parfois, pour zigzaguer à travers des régions reculées ou non, selon un chemin totalement confus et chaotique, même pour Likaon en personne.
La femme rousse, par contre, ne prenait jamais de douche, mais sentait toujours bon, de cette infime fragrance agréable et sauvage qui captait toujours l'attention de Bastien, et provoquait en lui quelques remous génétiques diffus et imperceptibles qui le plongeaient dans une certaine perplexité.

Et le paysage défilait encore et toujours par les grandes vitres du TGV, qui laissaient passer la lumière éclatante d'une journée grandement ensoleillée.
Des arbres, des champs, des prés verdoyants, mais des feuilles tirant peu à peu sur l'orange, le feu et le rouge de l'automne s'installant…
Catherina avait entrepris de lorgner sans en avoir l'air sur le sandwich du monsieur assis à côté de la vitre opposée à la leur.
Likaon, son éternel sourire innocent aux lèvres, ne décrochait pas de sa contemplation des vallons qu'ils dépassaient à toute allure, dans un silence feutré, à peine effleuré par le staccato des roues du train sur les rails.

Bastien décida de bouder, passablement énervé par l'insouciance de leur protectrice. Catherina ne l'entendait pas de cette oreille :
- Et où est ce que l'on va, maintenant ? Dit la jeune fille, excédée.
Elle détacha nerveusement son chignon, en quelques furieux, et s'en fit une queue de cheval. Cela devait être signe de quelque chose, chez elle. Une sorte de gri-gri étrange, mais Bastien n'aurait pas su interpréter cela. Toujours est il que Bastien trouvait Catherina de plus en plus mignonne, mais il ne doutait pas un seul instant que ses hormones faisait 90% du travail dans l'intérêt qu'il lui portait, vu le caractère de cochon de l'adolescente.
Il ne comprenait pas qu'on puisse trouver la puberté merveilleuse. Ce n'était jamais qu'une source de frustration, de tiraillements et d'énervement, pour lui. Un corps en furie pendant des années durant n'est jamais de tout repos, et ça, c'était bien plus vrai !
- Vous ne savez même pas où l'on va, accusa Catherina.
- C'est vrai, répondit nonchalamment Likaon sans quitter la vitre des yeux. Je n'ai que de vagues directions, mais vos "trains" n'arrêtent pas de zigzaguer, je n'y peux rien…
Elle fit une pause, puis soupira avec candeur :
- Je finirais d'ailleurs par croire qu'on aurait plus vite fait de voyager à pieds…
- Et vous dites que nous sommes en danger, mais depuis deux jours, nous n'avons pas vu l'ombre d'une menace ! Et l'on ne peut pas vraiment dire que vous ressemblez à un guide protecteur ! Continua Catherina, bien décidé à ne pas s'en laisser remontrer par la mollesse sereine de Likaon.
La femme rousse la regarda, de ce regard pénétrant qui semblait pouvoir vous enfoncer des phrases dans le crâne sans même passer par la télépathie ou la parole. Likaon la regarda intensément pendant quelques poignées de secondes, qui mirent mal à l'aise Catherina, et la gênèrent au point qu'elle ne trouva rien à dire de plus.
Alors que Likaon semblait sur le point de dire quelque chose, elle fronça les sourcils et tourna vivement la tête vers le paysage, scrutant les champs infinis et les bosquets dispersés du bas pays.
- Ah, je crois que nous n'allons pas tarder à arriver, vous allez être content.
- Hein !? Répondirent les deux adolescents en chœur.
- Mais il reste encore une heure de trajet au moins ! Plaida Bastien.
Likaon eut un petit rire :
- Si tu le dis…
Le garçon se sentit alors très bête, mais se consola quand il remarqua lui aussi ce que la femme rousse devait probablement être en train de regarder dans les champs. De temps à autre, il croyait voir des points noirs, dans le paysage, comme flottant à mi-hauteur, ou bien parfois au ras du sol, voire même à dix mètres de haut dans certains cas. De petits amoncellement de fumée noire opaque, de tailles variables. Un coup cela n'était qu'un point, et d'autres fois c'était un petit nuage grand comme un ballon. Cela restait très sporadique, et le TGV allait tellement vite que les choses noires étaient vite dépassées.
Bastien en vit d'abord une première, puis plus rien pendant une vingtaine de secondes.
Alors qu'il allait demander à Likaon ce que c'était, et que Catherina allait leur demander à tout deux ce qu'ils regardaient, il en vit une autre. Catherina s'arrêta la bouche ouverte, et se mit elle aussi à scruter ces apparitions bizarres, ces boules noires sortant de nulle part. Une autre apparue. Puis encore une, grosse comme une balle de tennis, cette fois là.
Encore dix secondes, puis trois nouvelles, de trois tailles différentes, à trois endroits et trois hauteurs elles aussi différentes. Puis plus rien pendant une trentaine de seconde…
- Qu'est ce que c'est ?! Demanda, assez alarmé, le garçon.
- Ca ? Dit à voix basse Likaon. Ce n'est pas grand chose, mais patientez, vous verrez…
La jeune femme rousse n'était pas du tout alarmée, mais sembla commencer à s'agiter légèrement, comme si le train devait bientôt s'arrêter en pleine nature, dans une dizaine de minutes tout au plus.
Tac ! Encore quatre points noirs.
Tac ! Dix secondes plus tard, encore deux, grands comme des ballons. Tac ! Tac ! Tac ! Leur nombre, leur taille, et leur fréquence, allaient augmentant, comme les jeunes gens eurent tout le temps de l'observer.
Les autres gens ne semblaient rien voir, et c'était bien dommage pour eux !
Quel effet météorologique étrange se déroulait devant leurs yeux ? Bastien était très circonspect, et intrigué. Des masses nuageuses noires, minuscules, qui apparaissaient ça et là, sans aucune raison apparente ?
- Yen a de plus en plus ou cela vient de moi ? Demanda prudemment Bastien.
Tac ! Cinq autres, plus grosses.
- Evidemment qu'il y en a de plus en plus, puisque cela nous concerne, répondit obligeamment Likaon.
Les adolescents se regardèrent l'un l'autre, puis la jeune fille s'approcha :
- C'est un raisonnement logique, ça ? Murmura Catherina à l'oreille du garçon, assez étonnée.
- Je l'ignore, répondit, toujours perplexe, l'adolescent.
Quelques secondes s'écoulèrent, puis tac ! Tac ! Deux séries de huit boules, plus proches les unes des autres cette fois là.
- Ce phénomène nous suit, on dirait, chuchota avec éloquence Catherina.
Bastien la dévisagea, assez incrédule. Elle rajouta :
- Enfin, si l'on oublie que c'est nous qui bougeons et pas elles… hum… euh… Tu vois ce que je veux dire ?
Bastien réfléchit, mais était tout à coup convaincu de la justesse du propos de son amie :
- Je… je crois que oui.
Aussi bizarre que cela paraisse, prendre le raisonnement par l'autre bout semblait être la chose la plus crédible. Et si ces boules, tac, tac, tac, n'étaient pas sur leur chemin, mais que eux, était sur le leur ?
Tac ! Tac ! Dix boules, grandes comme des moitiés d'hommes.

Likaon brossa brièvement ses avant bras, et empoigna son fusil. Ce qui ne manqua évidemment pas de paniquer les deux jeunes gens qui l'accompagnait. Comme d'habitude, personne ne réagissait au comportement de Likaon, quand même il arrivait parfois que des gens la regardent.
Les adolescents sentirent leur pouls s'accélérer.
- On y est presque, ça commence, se contenta de dire Likaon, avec un sourire contris et un regard soucieux.
Le cœur de Bastien pulsa de l'adrénaline dans ses veines. Il s'ennuyait profondément depuis des heures, et voilà que maintenant, il ne voulait plus, mais alors plus du tout, qu'il se passe quelque chose. La douloureuse réalité lui retomba sur les épaules. Enfin, la réalité décrite par un draracle au fond d'une cave, mais Bastien se sentit incapable de ne pas la croire et la prendre pour argent comptant. Il se sentait incapable de se convaincre que tout cela ne pouvait qu'être un rêve éveillé. Non, il avait malheureusement bien conscience de l'incroyable présence de Likaon et de sa winchester. Et elle semblait bien plus réelle que tout le reste, comme si la menace d'une guerre était une fatalité, et que le vague quotidien de la vie normale n'était qu'une chandelle de rêverie soufflée par le vent du présent, massif et impérieux, froid comme des glaciers de fer brut.
Pourtant, Bastien sentait la chaleur du soleil sur sa peau, et croyait entendre les vols d'oiseaux migrateurs piailler leur départ, au-dessus de leur tête.
Il sentait aussi la chaleur des mains de Catherina qui se refermaient sur son bras, et sa peur se mélangea de manière torve et sournoise à une forme simple de petit plaisir.


(c'est rageant de pas avoir la suite, pas vrai ? Je coupe au mauvais moment, mais il est tard et je suis trop fatigué pour continuer, mes doigts ne suivent plus ma pensée. Dites moi si ça vous plait, je ne sais même pas si quelqu'un a lu jusque là)
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