Partie 1 : Origines
Chapitre premier : La Meute
Elen fulminait. La balle était partie aussi vite que l'insulte qui avait déclenché sa colère. A en croire les sanglots dans son dos, la cible avait été atteinte... « Bâtard »... Encore et toujours ce soi disant problème de maternité, bien que tous les adultes du village ne doutent pas de la fidélité de sa mère.
Tous ces petits jeux l'agaçaient,tant le ballon que cette incessante lutte pour sa fierté, et il était encore plus en colère contre lui même. Lui qui n'était pas assez grand et fort pour travailler, alors qu'il dépassait de deux bonnes têtes les enfants de son âge (il avait alors neuf ans). Tel une petite tempête, il arpentait les rues du village à la recherche d'une occupation plus intéressante selon ses propres critères, bien éloignés de ceux d'un petit garçon de son âge.
A court d'idée il décida de partir dans les bois jouxtant le nord du village pour une énième « corvée » de bois. L'hiver à venir s'annonçait rude et quelques fagots ne seraient pas de trop sans compter que les escarmouche qui avaient lieux un peu partout depuis neuf ans allaient crescendo en fréquence et en force. Elle demeuraient pour l'instant dans le centre des terres, s'en trop s'en écarter. Les Dieux seuls savaient comment l'ennemi pouvait ainsi attaquer le centre du Royaume et en repartir sans se faire voir. Il noua en chignon ses longs cheveux d'argent qui suscitait l'admiration des adultes et les railleries de ses « camarades ». Il passa chez lui passer une tunique de cuir brune un peu usée et une solide paire de bottes.
-Et où vas-tu comme ça? Demanda sa mère.
Il répondit de sa voix à la fois claire et ferme :
-Chercher du bois en forêt. Ca ne sera pas de trop je pense....
-Fait attention. Ne vas pas te casser quelque chose dit-elle en acquiesçant.
Elen pris son petit coutelas et sortit. Certains s'étonneront peux-être du laxisme de Sharia vis à vis de son fils. Mais en dehors des rares escarmouches qui auraient pu avoir lieu, il n'y avait guère d'autres dangers dans les environs. Il y avait bien quelques loups mais il restait généralement à l'écart des Hommes où passaient sans s'en soucier. Et les Humains adoptaient la même attitude. Prenant sur le pas de la porte un sac à dos et quelques provisions qui se tenaient toujours là « au cas où » il se dirigea vers le bois.
Il arriva rapidement sous les frondaisons. Et commença à ramasser du bois mort. Il n'avait pas plus depuis quelques temps aussi le bois était-il relativement sec. Sa tache fut donc moins longue qu'a l'habitude. Pas pressé de rentrer, il déballa ses affaires et pris son déjeuner à l'ombre fraîche d'un chêne. Il s'y adossa à la fin de sa collation et ce fut bercé par le vent dans les feuillages qu'il s'endormit.
Ce fut le craquement d'une brindille qui le réveilla. Il n'avait jamais vu de loup, mais on les lui avait suffisamment décrit pour qu'il reconnu l'animal situé à quelques mètres de lui comme en étant un. La bête s'assit sur son arrière-train, la langue pendante, pendant que lui-même se relevait toujours collé au tronc d'arbre. Il riva ses yeux dans ceux, jaunes, de l'animal. Le loup continua à le fixer, pendant une durée interminable, et tout deux restèrent ainsi, fixe, se jaugeant l'un l'autre.
-Que fait donc un jeune Humain, seul dans ces bois?
-Je.... Je ramasse du bois.
Il trouvait relativement stupide de s'adresser ainsi au loup, mais il avait clairement compris ce qu'il avait dit. Il espérait qu'il en serait de même dans l'autre sens.
-Je suis heureux qu'il ne soit pas ici pour la chasse. Nous aurions du le bouter hors de nos terres... Les humains comprenant notre langue sont rare aussi nous aimons les préserver.
Jappements et mimiques se succédaient sur la face du loup, mais une voix semblait émerger de sa bouche à la place. Le vocabulaire utilisé lui semblait de plus... Déplacé. Les loups étaient des bêtes sauvages, mais il allait sans doute devoir revoir son jugement à leur sujet.
-Nous allons vous laisser...,Il entreprit de ramasser son bois et son sac, nous devons y aller.
-Tu attendras avec nous. Il y a des choses à ta tanière que tu ne dois pas voir. De mauvais humains y sont.
Elen ne compris pas grand chose de ce qui se passa ensuite. Il devint absent, se leva calmement, puis se mis à courir vers le village, le loup sur les talons, aboyant pour l'arrêter. Mais il allait vite, droit devant lui, et le chemin semblait se tracer, les arbres s'écarter au fur et à mesure qu'il avançait, sans qu'il s'en rende compte. Il s'arrêta à la lisière des arbres et tomba à genoux.
Kervalas était en flammes. Le feu courait partout. Dans les rues poussiéreuses et sèches, sur les maison, sautait de toit en toit. Aucun son, aucun bruit, juste des flammes et leur rugissement. Au travers de ses larmes ils distinguaient encore quelques formes dans les flammes. Sortant du village, allongée sur le sol étaient Shina, Vinka, Jolth et bien d'autres, qui avaient tenter de fuir mais étaient étendu sur le ventre, une volée de flèches empennées de noir dans le dos.
Il resta la à pleurer toutes les larmes de son corps, le loup appuyé à ses côtés, hurla pour les morts. Il faisait nuit lorsqu'Elen se releva. Nuit lorsque la dernière flamme du brasier s'éteignit. Elle avait consumé chaque corps et de Kervalas il ne restait rien qu'un large cercle irrégulier et noir. Avec quelques taches jusque là où ses habitants avaient réussi à fuir.Le feu avait accompli son office avec une implacable et surnaturelle détermination
Il tourna le dos à son habitation et suivit le loup à travers les bois.
-Je vais te guider jusqu'à la meute où tu pourras rester avec nous. Tu devras nous aider mais tu seras protégé...
Elen ne pipa mot et ainsi commencèrent de longs mois de vie sauvage. Ses cheveux poussèrent bas dans son dos, il grandit encore plus jusqu'à atteindre la taille d'un Homme au sommet de sa croissance, puis plus haut. Un an environ s'écoula. Il le sut lorsque les feuilles des arbres se remirent à tomber l'automne suivant. L'hiver avait été agréable couché au milieu du pelage chaud des loups. Le printemps et l'été avaient été emplis de jeux avec les jeunes louveteaux. Il avait taillé une dague dans les tibia d'une vache que la meute avait abattue. Il était vêtu à la mode naturelle, allant nu pied sur le sol, sans faire de bruit. Il avait fait des vêtements de fourrure, notamment de daim et de cerf. Il se souvenait particulièrement du premier cerf qu'il avait abattu. Il y avait beaucoup de brume ce jour là. L'aube se levait à peine, et les autochtones profitaient déjà de la fraîcheur matinale pour s'abreuver. Elen avait soif lui aussi. Il s'était avancé vers la mare pour se retrouver presque nez à nez avec un jeune cerf. Le vent était avec lui,et il ne discernait qu'une vague forme dans la brume, mais les bois de l'animal étaient bien présents, comme une menace.. Il bondit sur la forme à quelques mètres de lui. Le cerf se débattit, Elen suspendu à son encolure pour le mettre à terre. Mais la bête y parvint la première. Roulant sur le côté pour éviter d'être piétiné, il posa la main sur une branche épaisse _ coup de chance!_ se releva prestement et l'envoya vers la tête du cerf qui s'écarta. Pour mieux la recevoir dans le cou. Elen n'en revint pas. Le bois éclata en même temps que l'animal était presque décapité... La viande suffirait à la petite meute pour plusieurs nuits. Il avait ramené sa proie et fut acclamé par sa famille de quadrupède. Les femelles mettraient bientôt bas et elles avaient besoin de forces. Voilà qui les y aiderait.
Mais l'automne revint et avec lui le souvenir de Kervalas qui avait brûlé. Il s'était renforcé... Il faisait maintenant 1m90, finement musclé. Il était gracile et arborait un visage imberbe. Ce souvenir lui rappela qu'il n'était pas loup, aussi décida-t-il de partir en quête des Hommes et des tueurs.
Cette décision l'attristai car il avait appris à aimer ses compagnons. Le chef de la meute vint le voir un soir, alors qu'il s'allumait un feu.
-Tu ne vas pas bien Elen.
-Non, en effet. J'ai fait un choix qui me rend triste.
-Tu vas partir et quitter la meute.
-Oui.
-Cela attristera la meute de l'apprendre, mais c'est ton propre gibier que tu chasses. T'avoir parmis nous fût un plaisir, n'hésite pas à revenir.
-Merci... Je partirai dans la nuit.
Et c'est dans une nuit sans lune qu'il s'éloigna du camp. Le vent se mit à souffler faisant s'incliner les arbres millénaires sur son passage. Et la pluie se mit à tomber. La forêt pleurait le départ d'Elen.
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La suite devrait suivre sous peu. Merci.]